Près de 12 000 : ce serait le nombre de substances per- et polyfluoroalkylées (PFAS) désormais utilisées par l'industrie chimique… et potentiellement présentes dans l'environnement. En regard, la surveillance de la contamination dans l'eau par ces molécules se limite, en France, à une vingtaine d'entre elles. Ainsi pour l'eau potable, l'obligation de suivi, qui entrera en vigueur en 2026, se concentrera sur 20 PFAS (1) .
Des obstacles techniques à surmonter
Cette surveillance existe déjà pour le milieu aquatique pour certains PFAS. Dans un arrêté publié en mai 2022, le ministère de la Transition écologique a complété la liste. Désormais, les 20 PFAS qui seront recherchés en 2026 dans l'eau potable le sont déjà dans les eaux souterraines. Ces listes de surveillance des milieux naturels aquatiques pourront toutefois évoluer sous l'impulsion européenne. « Dans le cadre de la
Un encadrement en construction
Sur le plan international, les PFAS sont encadrés par la Convention de Stockholm de 2001, qui restreint uniquement la production et l'utilisation
du PFOS depuis 2009 et interdit l'import, l'export et la production de PFOA
depuis 2020. « L'interdiction de la production et de l'utilisation des PFHxS
était attendue en 2022 à la suite de la publication au JOUE, le 27 juin 2022,
de la décision de l'UE du 7 avril 2022 », indique la Dreal Rhône-Alpes.
À l'échelle européenne, une proposition de restriction des PFAS a été lancée
par cinq pays. Cela pourrait aboutir d'ici à 2023. À plus long terme, la révision
du règlement Reach pourrait conduire à la restriction de toute une famille de
substances (comme les PFAS) plutôt que de travailler substance par substance.
En France, quelques limites commencent toutefois à être mises en place.
« Depuis le 1er janvier 2023, une valeur d'émission spécifique de 25 μg/L pour les PFOS est fixée pour les rejets des ICPE dans le milieu naturel, rappelle la Dreal. Pour certaines installations de traitement de déchets relevant du régime de l'autorisation et de la directive relative aux émissions industrielles (dite IED), à compter du 17 août 2022, une surveillance semestrielle du PFOS et du PFOA devra être réalisée au niveau des effluents. » Et en 2026, une surveillance de l'eau potable pour 20 PFAS sera exigée.
Essayer de contourner les obstacles aux performances des méthodes analytiques constitue l'un des objectifs du projet européen Promisces. « Nous travaillons sur la soixantaine de composés que nous analyserons dans les eaux, mais également sur les matrices complexes, comme les sols, les sédiments, les boues de station d'épuration, ainsi que sur les eaux usées, très riches en matière organique et donc sources d'interférences, développe Julie Lions, chef du projet Promisces au BRGM. Nous souhaitons arriver à une méthode analytique ciblée capable de couvrir le maximum de composés en dégradant le moins possible ses performances analytiques. »
La recherche s'active
En parallèle, des approches alternatives se développent pour disposer d'une vision globale de la pollution. « Avec la méthode TOF, pour Total Organic Fluorine, les scientifiques essayent de mesurer la teneur en fluor organique total, ce qui donne une vision de la contamination en composés organiques fluorés et permet d'aller au-delà des listes réduites de substances, indique Hugues Biaudet. L'avantage de cette méthode est qu'elle est en voie de normalisation ; elle peut fournir des résultats homogènes d'un laboratoire à l'autre, mais elle n'est pas spécifique des PFAS : elle peut prendre en compte d'autres composés organiques fluorés. »
En complément de cette approche, une méthode plus spécifique aux PFAS est en cours de développement : le TOP essay. « À travers ces essais TOPs (pour Total Oxidizable Precursors), nous allons anticiper la présence de PFAS dits précurseurs pouvant se dégrader en PFAS plus toxiques », complète Julie Lions.
Sans attendre les résultats de ces travaux, une nouvelle campagne d'évaluation des niveaux de contamination pourrait être lancée par l'Anses à l'échelle nationale