Réunis à Lyon du 17 au 19 janvier 2023, plus d'une vingtaine d'entreprises, associations et établissements de recherche (dont RTE côté français) ont lancé un chantier capital pour l'avenir du développement de l'éolien en mer en Europe : baptisé Interopera, leur projet vise à définir les futures normes d'interopérabilité des réseaux de transport de l'électricité renouvelable produite grâce aux vents de l'Atlantique, de la Manche, de la mer du Nord, de la Baltique ou de la Méditerranée.
Éviter un déploiement chaotique de l'éolien en mer
Financé à hauteur de 70 millions d'euros par le programme Horizon Europe, il s'inscrit dans le cadre de la stratégie de la Commission européenne sur les énergies marines, qui cible l'installation de l'équivalent de 300 gigawatts (GW) d'éoliennes en mer d'ici à 2050 (pour 14,6 GW fin 2021). Cette ambition monumentale ne se compte pas seulement en nombre de mâts mais également en nombre de câbles de raccordement qu'il faudra déposer sur les fonds marins et tirer jusqu'aux côtes pour distribuer l'électricité produite. L'idée du projet Interopera est d'éviter que « la mer du Nord finisse par ressembler à un immense bol de spaghettis », image Sébastien Silvant, coordinateur du projet et responsable R&D de l'Institut de recherche SuperGrid, à Lyon.
Favoriser la mutualisation électrique
La solution, proposée par l'Institut SuperGrid, est de rendre ces différents systèmes de raccordement interopérables. Elle prendrait la forme de modules normés, identiques quel que soit le fabricant mandaté, pour les systèmes et composants des nœuds de conversion électrique. Ces derniers transformeraient ainsi le courant continu de haute tension, utilisé pour transporter l'électricité produite en mer, en courant alternatif conventionnel des réseaux électriques à terre. « L'idéal, à l'avenir, serait d'aboutir à des liaisons hybrides qui relieraient des terminaux à un ou plusieurs interconnecteurs interrégionaux ou internationaux, à la manière du parc éolien de Kriegers Flak en mer Baltique. » Inauguré en septembre 2021, ce dernier est relié aux parcs Baltic 2 et Baltic 1, au Danemark et en Allemagne, à l'aide de convertisseurs électriques.
Un travail de concertation technique autant que politico-économique que le centre de recherche lyonnais entend mener avec la « neutralité » dont il se réclame. « Nous ne sommes ni un client ni un fournisseur. Nous sommes donc les plus à même d'apporter une expertise neutre et d'assurer un rôle de médiateur suffisant pour aboutir à un consensus éclairé. » L'avenir du bon développement de l'éolien offshore en Europe en dépend, semble-t-il.