Le gouvernement poursuit le travail de simplification de la réglementation applicable aux installations classées (ICPE). Il a publié, dimanche 3 avril, deux arrêtés ministériels qui visent à homogénéiser sur le plan national la réglementation applicable aux installations relevant du régime de l'autorisation.
L'idée mise en œuvre par le ministère de la Transition écologique est de fixer à l'échelle nationale des prescriptions transversales, applicables tant en matière de risques chroniques qu'accidentels, plutôt que de les faire figurer avec de petites variantes dans chaque arrêté préfectoral d'autorisation individuel. « Les arrêtés ministériels sectoriels et préfectoraux viendront ensuite compléter ce socle minimal uniquement sur les prescriptions répondant aux risques particuliers des installations considérées », ajoute le ministère. Cette simplification doit permettre, outre d'homogénéiser l'application de la réglementation, de faire gagner du temps aux services de l'État dans l'instruction des dossiers et la rédaction des arrêtés préfectoraux.
Prévenir les risques chroniques
Un certain nombre de dispositions ont été modifiées à la suite à la consultation du public, en janvier dernier, et de la réunion du Conseil supérieur de la prévention des risques technologiques (CSPRT), le 22 février. Ces modifications ont notamment porté sur la réinjection en nappe d'eaux issues du traitement d'eaux souterraines polluées, l'obligation d'entretien des piézomètres ou encore le réexamen de l'étude hydrogéologique.
L'arrêté s'applique aux nouvelles installations et à celles faisant l'objet de modifications substantielles à compter du 4 avril 2022. C'est en particulier le cas des dispositions portant sur l'étanchéité des installations de stockage et de traitement des effluents aqueux. Par exception, certaines prescriptions s'appliqueront à compter du 1er juillet 2023 aux installations nouvelles, mais aussi existantes. Elles portent sur la réutilisation des eaux, les plans des réseaux, les meilleures techniques disponibles (MTD), la traçabilité des incidents, l'isolement des réseaux d'assainissement ou encore la surveillance des eaux souterraines.
Prévention des accidents
Le deuxième arrêté intègre, dans l'arrêté du 4 octobre 2010 relatif à la prévention des risques accidentels, des dispositions relatives à la maîtrise des procédés, des risques et de l'exploitation, ainsi que des dispositions relatives aux situations d'urgence et aux moyens d'intervention. Il modifie par ailleurs les dispositions portant sur la conception des rétentions à partir du retour d'expérience de l'accident de Lubrizol en matière de pertes de confinement. Le texte « toilette » par ailleurs les dispositions existantes de l'arrêté portant sur les risques liés aux séismes, à la foudre et aux équipements photovoltaïques.
Ce deuxième arrêté modifie, en outre, l'arrêté du 26 mai 2014 qui fixe des prescriptions en matière de prévention des risques spécifiquement applicables aux installations Seveso du fait de leur dangerosité. « Le texte introduit l'obligation de tracer, analyser et tirer le retour d'expérience » des défaillances ponctuelles des mesures de maîtrise des risques, explique le ministère de la Transition écologique.
Sur ce texte aussi, le ministère de la Transition écologique a apporté un certain nombre de modifications à la suite de la consultation publique et à l'examen du CSPRT. Elles portent notamment sur les délais de mise en conformité pour les réseaux de détecteurs, la fiabilité des systèmes de sécurité ou encore la fiabilisation des utilités alimentant les mesures de maîtrise des risques.
L'arrêté s'applique aux installations nouvelles et aux modifications substantielles d'installations existantes. Mais il s'applique aussi, à compter du 1er juillet 2023, aux installations dont la demande d'autorisation est antérieure au 1er septembre 2022. « Des délais spécifiques sont prévus pour la tenue des salles de contrôle, ainsi que pour la mise en place de certains détecteurs, reports d'alarme, positions de sécurité, dispositifs d'éclairage et pour la mise à jour des plans d'opération internes », indique le ministère de la Transition écologique. La disposition relative aux salles de contrôle, qui doit être mise en œuvre avant le 1er juillet 2027, prévoit que ces locaux doivent résister aux phénomènes dangereux susceptibles de les impacter.
Exemption des élevages ?
Lors de la consultation publique, quatre organisations de la filière agricole (FNSEA, La Coopération agricole, APCA, UGPVB) ont réclamé d'exclure les élevages du nouvel arrêté sur les risques industriels. « Pourquoi ne pas avoir retenu une exemption globale du secteur de l'élevage permettant ainsi d'éviter toute confusion avec des processus industriels qui diffèrent sensiblement d'exploitations à caractère familial ? » a ainsi interrogé la FNSEA.
Lors du CSPRT, la représentante du ministère de l'Agriculture a fait état d'une réunion préparatoire avec les représentants des organisations professionnelles agricoles visant à exclure ces installations de l'arrêté et, le cas échéant, à renforcer, dans un deuxième temps, les dispositions de l'arrêté sectoriel applicable à ces installations. Le président du CSPRT s'y est opposé, expliquant qu'il convenait de transférer d'abord les dispositions relatives aux risques accidentels dans l'arrêté sectoriel avant de décider que l'arrêté de 2010 ne s'appliquerait pas au secteur de l'élevage.
Jacky Bonnemains, représentant de l'association Robin des bois, a exprimé « son épuisement » vis-à-vis des demandes récurrentes d'exception du secteur de l'élevage. « L'élevage a justement pour particularité d'utiliser des substances dangereuses. En outre, les éleveurs ont des créatures vivantes sous leur responsabilité, souvent exposées à des incendies, car les réseaux électriques ne sont pas suffisamment entretenus », a-t-il expliqué.
Le représentant de la FNSEA, Thierry Coué, a accepté que soit mené un travail sur le dispositif général de prévention des risques sur l'arrêté sectoriel élevages, sans omettre de rappeler que les élevages n'étaient pas des usines.