Un rapport ministériel, publié jeudi 25 septembre, dresse un bilan mitigé des inspections et audits relatifs à la mise en œuvre dans les départements de la politique de prévention des risques naturels et hydrauliques portant sur la période de 1997 à 2012. Le document de 82 pages (1) , rédigé conjointement par le Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), montre que par le biais de ces audits, la connaissance en matière de risque progresse. Cependant, la plupart des administrations n'y prête pas grand intérêt. Quant aux citoyens, ils restent mal informés, malgré les obligations légales.
Il conviendrait donc d'améliorer la synthèse annuelle et de l'enrichir d'un nombre limité de recommandations. Surtout, "les audits [devraient aller] au-delà de l'appréciation de la mise en œuvre des procédures et [s'efforcer] d'évaluer l'effectivité des politiques de prévention".
La période retenue est particulièrement importante en matière de gestion des risques naturels, puisque "ces quinze années ont été marquées par des catastrophes mondiales (tsunami dans l'océan Indien en 2004, ouragan Katrina en2005, tsunami de Fukushima en 2011) et nationales (tempêtes de 1999, inondations du Gard en 2002 et du Var en 2010, événement Xynthia en 2010)". De plus, la période marque une "évolution significative" de la législation (voir encart).
Plus de moyens et de connaissances
Premier constat, les audits témoignent d'une meilleure prise en compte des risques sur la période. Les premiers audits "soulignent la faiblesse des moyens humains affectés aux politiques de prévention des risques" dans les départements, mais grâce aux regroupements et à "une plus grande sensibilité des directeurs de ces services", la situation s'améliore. Seul bémol, le renouvellement rapide du personnel fragilise la situation. De même, les moyens financiers "progressent (…) notablement", sous l'effet conjugué de la hausse des crédits budgétaires et de la mise en place, après 2000, du fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit "fonds Barnier", qui contribue à la réalisation des plans de prévention des risques (PPR).
Quant aux aléas, leur connaissance progresse notamment grâce à l'apport des établissements publics spécialisés : le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), l'Institut de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture (Irstea, ex-Cemagref) et l'Office national des forêts (ONF). De même, la surveillance des événements atmosphériques et la prévision des crues s'améliorent. En revanche, la connaissance des vulnérabilités "est peu évoquée dans les rapports d'inspection ou d'audits", indique le document, précisant qu'elle ne commence à être sérieusement étudiée que tardivement.
Mais l'information ne circule pas
Conséquence de ces progrès, les inspections et audits "apportent une évaluation utile et appréciée". Néanmoins, cet audit "passe inaperçu" auprès des administrations centrales, mise à part la direction générale de la prévention des risques (DGPR). Quant aux autres acteurs de la prévention des risques, ils "n'ont connaissance ni des audits, ni des synthèses", puisqu'ils ne sont pas publiés, hormis ceux de 2011 et 2012.
Quant aux collectivité locales, le rapport pointe "un manque d'implication", malgré l'obligation d'informer acquéreurs et locataires introduite par la loi de 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, dite "loi Bachelot". Ainsi, la mission constate que les dossiers communaux d'information sur les risques majeurs (Dicrim) "ont toutes les peines du monde à voir le jour". En effet, certains acteurs, dont les collectivités territoriales, estiment que les Dicrim et les repères de crues "ne permettent pas une appropriation de la situation suffisante pour les populations et donc l'acquisition de comportements adaptés au moment des événements". De même, le nombre des PPR a fortement augmenté, mais, "ils n'ont (…) pas été réalisés partout selon des critères homogènes, la concertation avec les collectivités locales ayant souvent abouti à des adaptations par rapport aux principes rappelés dans les circulaires".
Etre plus complet pour intéresser plus d'acteurs
La législation s'enrichit
Le document rappelle que trois lois jettent les bases de la prévention des risques : celle de 1982 définissant un régime d'indemnisation suite à une catastrophe naturelle (Catnat), celle de 1987 relative à l'information préventive et celle de 1995 créant les plans de prévention des risques (PPR).
Ces lois ont ensuite été complétées par quatre textes : la loi de 2003 sur la prévention des risques, qui oblige à informer les acquéreurs et locataires sur les risques, celle de 2004 relative à la modernisation de la sécurité civile, qui crée les plans communaux de sauvegarde, celle de 2006 sur l'eau et les milieux aquatiques, qui renforce le contrôle de la sécurité des ouvrages hydrauliques et enfin la loi Grenelle 2 de 2010, qui transpose la directive européenne sur les inondations.
Quant au contenu des audits, le rapport préconise qu'ils "[s'intéressent] à la connaissance de la vulnérabilité". Cette approche est notamment nécessaire à la hiérarchisation des risques et au classement en terme de priorité des actions à mener. De même, le rapport appelle à mettre en œuvre la directive Inspire, qui vise à rassembler les données géographiques, pour faciliter l'accès aux données relatives aux risques. En effet, si la DGPR et l'observatoire national du risque naturel (ONRN) travaillent à cette consolidation des informations, la mission constate néanmoins que "des cartes de risques existent au niveau régional, plus précises que celles dont dispose l'échelon national".
Enfin, il conviendrait d'"apprécier dans les audits les informations disponibles sur la connaissance effective par la population des risques auxquels elle est exposée et des moyens de les prévenir". Le document rappelle notamment qu'un précédent rapport sur le plan de submersion rapide proposait de conditionner les versements des subventions des programmes d'action de prévention des inondations (Papi) à l'existence effective des repères de crues.